En une semaine, l’Olympique
de Marseille s’est incliné lors de ses trois dernières rencontres.
Autant de défaites qui remettent en cause son bon début de
championnat et qui compromettent son avenir en Ligue des Champions. De
quoi entrer en crise ? Analyse.
La leçon de Lyon
Depuis la mi-octobre, la
balance des résultats de l’Olympique de Marseille est largement
déficitaire : deux petites victoires – Rennes et Monaco «
bis » sur le même score (2-0) – pour cinq défaites lourdes
de conséquences. Deux revers face à Porto (2-3 et 0-1), son
adversaire direct en Ligue des Champions, et c’est la qualification pour
la seconde phase qui paraît s’envoler. Trois échecs en championnat
– Strasbourg (1-4), Bordeaux (0-1) et Lyon (1-4) – et l’OM passe de la
seconde à la troisième place, à six points du leader
Monaco et avec seulement un point d’avance sur son grand rival, le Paris
Saint-Germain. A égalité de points avec l’Olympique lyonnais
avant leur confrontation, les Phocéens pensaient, à l’image
de Steve Marlet, disposer du « potentiel pour accrocher cette équipe
». Quatre-vingt-dix minutes plus tard, la leçon de football
donnée par les Rhodaniens aux marseillais rend compte d’une véritable
différence de niveau entre les deux clubs. Face à une équipe
solide, habile et techniquement supérieure, les joueurs de Marseille
ont paru bien impuissants. Et dire que l’OM avait enchaîné
six succès d’affilée à domicile en championnat en
ne concédant jusqu’ici que deux buts (contre Nice et Bastia).
Perrin en danger ?
Au lendemain de la défaite
contre l’OL, le président marseillais ne semblait guère inquiet
quant à l’avenir d’Alain Perrin à la tête de l’équipe
phocéenne. Selon Christophe Bouchet, « la question ne se pose
même pas. […] C'est vraiment une question sans objet ». Ce
n’est pas l’avis de certains supporters qui, à l’issue de la rencontre
face à Lyon, ont réclamé la démission de l’entraîneur
de l’OM. Ce dernier a rétorqué qu’il ne « démissionnerait
pas » et qu’il se trouvait « assez serein sur [sa] manière
de travailler ». Mais ces supporters semblent avoir déjà
oublié le bon travail effectué la saison dernière
par le technicien olympien. S’il faut du temps pour construire une équipe
compétitive au niveau européen, beaucoup d’observateurs imputent
à l’ex-coach troyen la mauvaise série des Marseillais. Lui
sont reprochés tant sa gestion humaine du groupe que ses choix tactiques.
L’affaire Barthez a ainsi créé un malaise au sein de l’effectif.
Certains joueurs, tel Vedran Runje, ont été affectés
par la manière dont Bouchet et Perrin ont présenté
la possible arrivée du gardien de l’équipe de France à
l’OM. D’autres ont été touchés par le discours de
l’entraîneur olympien à la suite de la défaite concédée
contre le Real Madrid (2-4). En les désignant comme seuls coupables,
Alain Perrin a refroidi considérablement ses relations avec les
joueurs.
Turn over = Game over
Le match de Madrid marque
en effet la véritable cassure qui a brisé l’élan marseillais
du début de saison. Avant la rencontre, l’OM comptait, toutes compétitions
confondues, six victoires, un nul et une défaite. Depuis, les Phocéens
ont gagné cinq fois mais ont également perdu à sept
reprises. Le déplacement à Madrid constitue aussi le point
de départ des expérimentations tactiques et du management
hasardeux de Perrin. Jusqu’à présent fidèle à
un 4-4-2 classique, le technicien marseillais a mis en place un 3-4-3 contre
Madrid et un 4-1-3-2 sur la pelouse de Porto. Deux échecs pour autant
de tentatives. Mais, au vu des derniers résultats de l’OM, le traditionnel
4-4-2 ne donne pas non plus satisfaction. Une raison supplémentaire
réside alors dans l’obstination de Perrin à sans cesse faire
tourner son effectif. Pour les supporters, cette tendance est néfaste
au rendement de l’équipe et c’est pourquoi certains d’entre eux
ont brandit une banderole pour le moins explicite lors du match face à
Lyon : « Supporters omniprésents, joueurs désespérants
: turn over = game over ». Enfin, dernier constat concernant les
choix de Perrin : sa fâcheuse habitude à utiliser des joueurs
à des postes qui ne sont pas les leurs. Ainsi, Vachousek, milieu
axial ou second attaquant, joue régulièrement milieu gauche,
Skacel, milieu gauche, est placé au poste de latéral gauche,
Marlet et Sytchev, attaquants, se trouvent souvent à la droite du
milieu, Perez et Meïté, arrière droit et défenseur
central, ont joué respectivement à Porto milieu droit et
latéral droit, Hemdani, milieu défensif, a pratiquement évolué
à tous les postes sauf en attaque, …
La parole aux joueurs
Pour les joueurs, difficile
de s’y retrouver. Ces multiples rotations ne facilitent pas la création
d’automatismes. Contre l’OL, les longs ballons balancés par Perez
et Van Buyten en direction de leurs attaquants démontrent l’incapacité
des Marseillais à construire et faire le jeu. Avec un milieu de
terrain qui manque de technique et une attaque en panne lorsque Drogba
est absent, la cohésion offensive semble presque inexistante. Et
comme la défense, souvent prise de vitesse, commence également
à montrer des signes de faiblesses, l’ensemble des joueurs doit
se remettre en cause. Certains, tel Daniel Van Buyten, ne fuient d’ailleurs
pas leurs responsabilités : « Je nous ai trouvé minable
en première période. On aurait dit des gamins devant des
joueurs de foot », a déclaré le défenseur belge
après la défaite à Porto. Une prise en charge collective
est maintenant attendue. Si certains parlent déjà de «
mini-crise » (Steve Marlet), d’autres préfèrent rappeler
que l’OM est toujours en course pour le titre de champion de France et
qu’il lui reste une petite chance de se qualifier pour le second tour de
la Ligue des Champions ou, tout du moins, de continuer l’aventure européenne
en Coupe de l’UEFA. Sans oublier que Perrin compte à la fois sur
le mercato pour se renforcer (on parle de recruter Barthez et un meneur
de jeu), sur le réveil des ses deux internationaux français
(Marlet et Christanval), et sur le retour de blessure de joueurs de qualité
tels Dos Santos, N’Diaye ou Beye. Avec toutes les cartes en main, Alain
Perrin va devoir faire évoluer quelque peu la façon dont
joue son équipe. Pour recréer une dynamique de jeu, il positionnera
sans doute les joueurs à leur vrai poste et devrait effectuer moins
de changements au fil des rencontres. Car définir une équipe-type
devient urgent pour le coach marseillais.
Le joueur : Didier Drogba
En quittant Guingamp pour
l’Olympique de Marseille, Didier Drogba ne pensait sans doute pas qu’il
allait faire l’unanimité si rapidement auprès des supporters
phocéens. Et pourtant, en l’espace de quelques matchs, grâce
à sa puissance (1m88 pour 74kg) et sa fougue, il a conquis l’ensemble
du public marseillais. Avec douze réalisations à son actif
(sept en championnat et cinq en Ligue des Champions), cet international
ivoirien âgé de 25 ans est incontestablement le leader de
l’attaque phocéenne. Suspendu contre Lyon suite à son expulsion
à Bordeaux, son talent mais aussi son esprit de compétition
ont cruellement fait défaut à l’OM. Car, autant que son efficacité
devant le but, c’est de son charisme et de son caractère que Marseille
a aujourd’hui besoin.
La stat : 23
23, c’est le nombre de joueurs
utilisés par Alain Perrin depuis le début de la saison en
championnat. Statistique encore plus significative, 18 de ces 23 joueurs
ont joué au moins cinq rencontres sur les treize journées
de Ligue 1. Ces chiffres considérables démontrent à
quel point l’entraîneur marseillais prend le parti de faire tourner
son effectif. Avec, pour l’instant, plus ou moins de réussite.
La décla : Christophe
Bouchet
« Il faut toujours
qu’il se passe quelque chose à l’OM, c’est consubstantiel. Les joueurs
le savent d’ailleurs très bien. Quand vous arrivez dans un club
comme celui-ci, vous savez que le traitement sera différent. Si
vous avez peur d’aller en première ligne, alors il vaut mieux aller
voir ailleurs. L’OM, ça détruit ou ça transcende :
il n’y a pas d’alternative ».
En crise ou non, l’OM
sera vite fixé : dans les prochaines semaines, le club phocéen
rencontrera successivement le Real (le 26 novembre), le PSG (le 30 novembre),
Monaco (le 6 décembre) et Belgrade (le 9 décembre). De quoi
y voir plus clair sur les réelles capacités de Marseille
cette saison et sur le futur de Perrin à l’OM.
Réagir
à cet article - Par Rodolphe Cazejust
|